De grands musées à l'assaut des régions
En moins d’un an, cinq musées nationaux parisiens se sont promenés dans l’Hexagone. Vieille antienne des politiques de démocratisation et d’accès à la culture, de quoi ce boom des dispositifs de circulation des collections nationales est-il le signe ? TEXTE DE SARAH HUGOUNENQ
Dans une ambiance feutrée, vingt-cinq chefs-d’œuvre chinois du musée Guimet s’invitent depuis novembre au musée d’art Roger- Quilliot (MARQ) de Clermont- Ferrand. À Gien, dans le Loiret, d’étranges modules colorés sur roulettes renferment depuis cet hiver, dans une Poste ou un supermarché, des reproductions d’œuvres d’Auguste Rodin conservées par son musée parisien. Quelques mois plus tôt, le Muséum national d’histoire naturelle inaugurait ses « Pop’up », cinq dispositifs itinérants sur les sciences, dont la première tournée irrigue des lieux publics des Hauts-de-France. Plus incongru est l’affichage depuis mars des reproductions de pièces du musée du Louvre dans les centres commerciaux du groupe UnibailRodamco-Westfield, de Dijon à Lyon. Quant au musée d’Orsay, il projette, à l’horizon 2026, un Mumo x Orsay, ce « MUsée MObile » (dans un camion) inventé en 2011 par Ingrid Brochard, entrepreneuse philanthrope, pour
sillonner les milieux ruraux ou périurbains(lire l’encadré page 25). Le constat est implacable : les musées nationaux rivalisent d’inventivité pour exister hors de Paris.
Une obsession ancienne
À bien y regarder, la circulation des collections publiques est une obsession ancienne, pour ne pas dire consubstantielle à la création des musées. Dès 1801, l’arrêté Chaptal imposait aux collections saisies à la Révolution et rapatriées à Paris, au Musée central des arts, futur musée du Louvre, de déposer ses collections en région en créant une vingtaine de musées des beaux-arts (à Lyon, Bordeaux, Nantes, ou même Genève à l’époque française). Mais il a fallu attendre 2013 pour qu’un premier musée national soit implanté hors d’Île-de-France, avec l’inauguration du Mucem à Marseille...
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