AGIR POUR L’ÉMANCIPATION DES JEUNES FILLES

Magazine 822 - Février 2022

Le président 2021-2022 du Rotary International, Shekhar Mehta, fait de l’émancipation des filles l’une de ses priorités. Ses encouragements auprès des Rotary clubs à agir dans ce sens trouvent des échos à travers le monde, quel que soit le niveau de développement des pays. Les Rotariens agissent pour faire évoluer les mentalités, usant de leur influence et apportant des moyens pour progresser vers l’égalité des chances.

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Lors de sa prise de fonctions en juillet dernier, Shekhar Mehta déclarait :« Aujourd’hui encore, les filles et les jeunes femmes rencontrent des difficultés démesurées partout dans le monde, mais nous avons le pouvoir de changer cela. Leur émancipation passe par un meilleur accès à l’éducation, à de meilleurs soins, à l’emploi et à l’égalité dans tous les domaines. Ces éléments doivent être au cœur de toutes les actions montées par le Rotary. Les filles seront amenées à assumer des responsabilités et nous devons les aider à façonner leur avenir ». Un appel entendu par nombre de clubs qui apportent des solutions concrètes, tant sur le plan de l’accès à l’école, que sur la formation professionnelle ainsi que sur la sensibilisation des droits de chacune.

 

L’école pour toutes

Sur les 760 millions d’adultes analphabètes que compte le monde, les deux-tiers sont des femmes ; une partie d’entre elles n’ont pas eu accès à l’instruction pour des raisons matérielles, d’autres ont été volontairement tenues à l’écart de toute instruction afin d’être plus facilement soumises.

Afin d’inciter les familles à envoyer les filles à l’école primaire, de nombreux Rotary clubs d’Afrique sub-saharienne prennent à leur charge les frais de cantine. Cette mesure soulage financièrement beaucoup de familles, en particulier des régions rurales, mais elle est souvent freinée par l’absence de sanitaires dans les écoles. Pour contourner cet obstacle, beaucoup de constructions de latrines sont entreprises, à l’instar du Rotary club Conakry (Guinée) qui vient d’équiper l’école rurale de Mankountan, en plus de la construction de cinq salles de classe. Thierno Lliassa Baldé, président du Rotary club Conakry, souligne que « cet établissement scolaire accueille 670 élèves dont 211 jeunes filles actuellement ; en agissant ainsi, nous sommes guidés par le sentiment que seul un peuple instruit et bien éduqué peut rivaliser avec un autre sur le chemin du progrès. »

L’existence de toilettes dignes de ce nom ne suffit pas toujours à encourager les familles à envoyer leurs filles à l’école. Celles-ci sont souvent dévolues à des corvées d’eau potable qui se trouve parfois à plusieurs kilomètres de leur habitation. Les très nombreuses installations de puits entreprises par les Rotariens, souvent avec l’appui de l’association d’essence rotarienne Eau sans frontières internationale (ESFI), contribuent à faire reculer l’absentéisme des filles à l’école.

En Tunisie, le Rotary club La Marsa se montre très actif en intervenant aussi bien à l’école primaire qu’au lycée. Ce club fournit en effet à l'école Sidi Ammar à Fernana (Nord-Ouest du pays) des vêtements aux filles des milieux les plus modestes et prend à sa charge pendant deux années les frais de scolarité et d’internat de quatre jeunes filles du lycée de Nebeur au Kef-Tunisie. À l’occasion de la Journée mondiale des filles (le 11 octobre), les Rotary clubs Casablanca La Sqala et Casablanca Anfa décident de prendre en charge durablement le transport scolaire de collégiennes habitant dans un village de pêcheurs situé à 40 km de leur établissement. Ces jeunes filles poursuivent leur scolarité grâce aux efforts de ces deux clubs investis en faveur de l’émancipation des femmes. L’instruction est une condition première à l’autonomisation des jeunes filles, renforcée par une formation professionnelle.

 

 

La formation professionnelle

Le président Shekhar Mehta a visité au Ghana la Soronko academy où le Rotary club Accra Airport, en partenariat avec le Rotary club Limburgerhof-Vorderpfalz (Allemagne), mène une action pluriannuelle de formation de 300 jeunes filles à l’économie digitale et la programmation. « Il convient d’étendre le concept d’alphabétisation à l’identification, la compréhension et la communication dans ce monde numérique. Même si l’alphabétisation de base demeure primordiale, celle au numérique est et sera essentielle dans ce monde plus informatisé que jamais » souligne la gouverneure du district 9102 Rufine Lima-Quenum.

L’autonomisation de jeunes filles par la formation à un métier s’illustre parfois par le don d’outils, comme les machines à coudre modernes offertes par le Rotary club Lomé à des apprenties de la capitale togolaise fraîchement diplômées en couture. Une action similaire est conduite par le Rotary club Paris en faveur de migrantes présentes sur le territoire français.

L’accession à des métiers moins féminins est proposée, comme le fait le Rotary club Port Louis Citadelle, soutenu par le Rotaract club Rushmore Business School. Ces deux clubs mauriciens, en collaboration avec le Women in logistics and transport des îles de l'Océan indien, informent des jeunes filles sur les possibilités de travailler dans le secteur du transport et de la logistique ; cette action symbolise dans tous ses aspects l’engagement en faveur de la Diversité, l'équité et l'inclusion (DEI) encouragé par le Rotary International. Narad Dawoodarry, président du Rotary club Port-Louis Citadelle, déclare à la presse que « les filles seront amenées à assumer des responsabilités, les Rotariens doivent les aider à façonner leur avenir. La mixité est donc une question d’une grande actualité en transport et logistique ». Il annonce la tenue d’un séminaire sur la féminisation des métiers maritimes et portuaires en avril prochain et souligne que « les femmes qui travaillent dans ce secteur représentent 20 % des effectifs salariés, alors qu’elles n’étaient que 14% en 2005. »

Pour faciliter l’insertion professionnelle de jeunes femmes déjà mères de famille, des actions sont menées. Le Rotary club Abidjan Biétry a rénové et équipé un centre de protection de la petite enfance. La ministre de la Solidarité, de la cohésion sociale et de la Lutte contre la pauvreté, Mariatou Koné, a présidé l’inauguration de cette structure en déclarant : « C'est une réhabilitation qui va contribuer à l'autonomisation de la femme. Grâce à ce centre, nombreuses seront les femmes qui pourront vaquer sereinement à leurs occupations en laissant leurs enfants dans de bonnes mains", s'est réjouie la ministre…et ancienne présidente du Rotary club Abidjan Biétry. Mariatou Koné est actuellement ministre de l’Éducation nationale et poursuit son engagement contre l’illettrisme en Côte d’Ivoire.

 

 

La connaissance des droits

L’information reste capitale pour l’émancipation des filles, que ce soit en matière de droit, de santé, de procréation ou de lutte contre les abus de toute nature. Si toutes les filles terminaient leurs études primaires, il y aurait beaucoup moins de décès maternels. Un enfant a plus de chances de survivre après l'âge de 5 ans s'il est né d'une mère qui sait lire. Au Bénin, les Rotary clubs Cotonou Locomotive Ganhi, Cotonou Haie-Vive et Porto-Novo, appuyés par leurs clubs filleuls Rotaract et Interact, procurent des informations d’éducation sexuelle à des jeunes filles.

Dans de nombreux pays en voie de développement, les Rotariens sensibilisent la jeunesse, en particulier les filles, aux maladies sexuellement transmissibles, et en particulier le Sida.

On estime que plus de 100 millions de filles de moins de 18 ans se marient chaque année dans le monde et que les grossesses sont la première cause de mortalité des filles de 14 à 18 ans. D’où la nécessaire information prodiguée par des Rotary clubs et des Rotaract clubs qui rencontrent la jeunesse dans un but pédagogique. Les clubs se heurtent parfois à des pratiques ancestrales telles que l’excision, comme c’est le cas en Égypte ou dans la Corne de l’Afrique, et doivent expliquer aux familles les dangers de tels rites.

Lorsque les violences physiques sont fréquentes, les Rotariens incitent les jeunes filles à porter plainte ou leur apprennent à se défendre : le Rotary club Poona (Inde) organise des ateliers pour enseigner les arts martiaux à des jeunes filles afin qu'elles puissent se défendre contre des agresseurs. Néanmoins, les actions menées par les Rotariens ne concernent pas uniquement les pays en voie de développement.

 

 

Des interventions en France

Au pays des Droits de l’Homme, des progrès sont encore à faire en faveur de l’émancipation de jeunes filles. L’ancienne gouverneure du district 1740, Catherine Gil, est mandatée par l’administrateur du Rotary International – Roger Lhors- afin d’encourager les clubs de la zone 13*, par l’intermédiaire des gouverneurs, à agir dans ce domaine et à répertorier les actions entreprises au cours de l’année rotarienne. Elle souligne que « la question de l’émancipation des jeunes filles ne peut pas être reçue de la même façon dans tous les pays, mais que les Rotary clubs de France peuvent agir dans le pays sur le plan de l’éducation en dénonçant le harcèlement et sur le plan professionnel, en incitant notamment les filles à se destiner vers des emplois où elles sont peu présentes. » Catherine Gil souligne que des prix rotariens attribués à des jeunes filles pour des réalisations professionnelles sont d’excellents exemples d’actions de promotion de la femme.

Si les progrès vers l’autonomisation des jeunes filles coulent de source dans nombre de sociétés du monde, l’actualité mondiale montre actuellement des reculs. Le retour des Talibans en Afghanistan, la persistance des exactions de Boko Haram au Sahel sont là pour nous le rappeler. Rappelons que l’une des traductions de « Boko Haram » est « École interdite ». Tout un programme !

 

 

La Journée internationale de la fille

Mise en place par l’ONU en 2012, célébrée chaque année le 11 octobre, cette journée a pour vocation de souligner les difficultés de fillettes et d’adolescentes dans leurs droits par rapport aux garçons. Chaque année à cette date, l’UNICEF lance une nouvelle campagne « pour donner à des filles la possibilité de faire entendre leur voix et de se mobiliser pour leurs droits » Cette journée est différente de la Journée internationale des femmes célébrée le 8 mars.

 

 

*Un livret de l’année rotarienne

Catherine Gil, membre du Rotary club Rodez, coordonne les actions des clubs de la zone 13 qui facilitent l’émancipation des jeunes filles. Un recueil des actions réalisées par les clubs de France, de Wallonie, du Luxembourg, d’Andorre et de Monaco est en préparation. Les informations sont recueillies par le correspondant de district de cette question avant le 1er mai afin qu’un exemplaire du livret soit remis au président Shekhar Mehta lors de la Convention de Houston.

 

 

TEXTE DE CHRISTOPHE COURJON

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